La vision antique d’Homère évoquant les automates d’Héphaïstos dans l’Iliade apparaît très actuelle. Les robots du XXIe siècle laissent penser qu’ils sont en mesure de concurrencer l’humain, voire de le dépasser en tout point, faisant alors émerger des revendications pour leur attribuer la personnalité juridique. La résolution du 16 février 2017 sur les règles de droit civil sur la robotique avait d’ailleurs estimé que les robots « intelligents », en raison de leurs capacités inédites, rendraient difficilement applicables les régimes de responsabilité actuels et ouvraient la voie à la création d’une personnalité juridique dédiée. En suggérant que leur autonomie posait la question de leur nature à la lumière des catégories juridiques existantes, la résolution amorçait-elle même peut-être discrètement une évolution plus profonde de nature transhumanisme. La résolution du 20 octobre 2020 sur le régime de responsabilité civile pour l'intelligence artificielle a écarté avec raison l’éventualité de leur attribuer la personnalité juridique. Elle a préféré s’atteler à la question cruciale du régime de responsabilité civile à adopter en IA. Même si pour l’instant, ce sont les règles classiques de la responsabilité civile qui s’appliquent pour indemniser la victime en cas de dommage causé par un robot, l’Union européenne pourrait prochainement créer un régime spécifique de responsabilité. Ainsi, pour les systèmes d'IA à haut risque, on pourrait se diriger vers la création d’une responsabilité objective du fait de ces systèmes à haut risque, tandis que pour les autres systèmes d’IA, on pourrait s’orienter vers une responsabilité pour faute de l’opérateur. Cela montre bien que l’on peut réfléchir à la responsabilité civile en IA sans avoir besoin du secours d’une inopportune personnalité juridique.